Dans cette interview publiée dans Le Moniteur le 21 avril 2020, Cyril CHAPUY explique comment les bureaux d'études spécialisés en géotechnique préparent la reprise du travail sur le terrain.
Les bureaux d’études spécialisés dans la géotechnique se préparent à retourner sur le terrain en s’appuyant sur un recueil des bonnes pratiques de la profession formalisé ce vendredi 17 avril. Cyril Chapuy, secrétaire de l’Union syndicale de géotechnique qui regroupe 53 adhérents en France, fait un état des lieux de la profession. Membre actif du syndicat professionnel, il est aussi le président du groupe Géol France qui regroupe Abesol et 2GH, deux bureaux d’études respectivement basés à Toulouse et à Alès (3,7 millions d’euros de chiffre d’affaires, 35 salariés). Il explique au Moniteur comment il prépare la reprise.
Pourquoi avoir rédigé votre propre guide des bonnes pratiques ?
Le guide OPPBTP ne nous concerne pas totalement. Seuls quelques rares géotechniciens sont sous la convention collective du BTP. Les autres dépendent de la convention collective de Syntec. Pour cela, nous avons décidé de rédiger notre propre guide. Nous nous sommes appuyés sur le guide de l’OPPBTP renforçant et adaptant certains dispositifs.
Quelles sont les principales préconisations ?
Notre guide des bonnes pratiques comprend des schémas, dessins et photos expliquant comment se laver les mains ou porter un masque. En termes de transport de salariés, il préconise la pose de cloisons ou bâches en plastique s’il y a deux salariés dans un même véhicule. Il décrit également l’activité de bureaux qui est importante dans notre profession limitant le nombre de personnes par pièce, notamment lors de des réunions. Concernant notre activité spécifique de sondage, il décrit comment positionner les barrières entre l’opérateur qui pilote la foreuse et l’aide-sondeur qui alimente en tige la foreuse. Il impose d’utiliser le treuil pour tout déplacement de charge.
« En milieu urbain, nous ne pouvons pas travailler, faute d’informations sur le positionnement des réseaux »
Comment se porte la profession ?
Depuis le 23 mars, nous envoyons chaque semaine un questionnaire aux adhérents de l’Union syndicale de géotechnique. Sur les 53, 42 ont répondu. Concernant les études, 74 % des ingénieurs n’ont pas cessé de travailler que ce soit en télétravail ou en présentiel. Au niveau du suivi des chantiers, 50 % des effectifs ont été maintenus. Il est à noter que nous dépendons de nos clients. Certains n’envisagent la reprise que le 11 mai. Par ailleurs, en milieu urbain, nous ne pouvons pas travailler, faute d’informations sur le positionnement des réseaux. En effet, les concessionnaires de réseau ne se déplaçaient pas à ce jour. Enfin, des chantiers ne sont pas faisables car il est impossible de respecter les consignes de sécurité. Je pense aux expertises à réaliser chez un particulier ou aux lieux trop exigus. Aujourd’hui, neuf des adhérents de notre syndicat professionnel n’ont toujours pas repris les chantiers.
Vous dirigez deux bureaux d’études. Quelle est la situation ?
Face à l’urgence sanitaire générée par la propagation du Coronavirus, nous avons fait le choix, dès le 16 mars, de protéger la totalité des effectifs de nos deux sociétés Abesol et 2GH. Nous avons instauré le télétravail pour 100 % des salariés administratifs et des ingénieurs. Nous n’autorisions la présence que d’une seule personne à la fois dans les laboratoires. Enfin, nous avons suspendu la quinzaine de chantiers sur lesquels nous devions intervenir. Juridiquement, nous avions la possibilité de faire intervenir nos techniciens sur le terrain. Mais nous avons rapidement écarté cette option. D’une part, nous ne pouvions pas assurer la sécurité à 100 %, malgré toutes les mesures protectrices. D’autre part, nous n’avons pas souhaité donner le sentiment d’un « deux poids, deux mesures » avec nos salariés en télétravail.
« Nous avons rédigé une procédure d’intervention chez les professionnels et une autre chez les particuliers »
Vous vous préparez à retourner sur le terrain le 27 avril à partir de quatre critères. Lesquels ?
Tout d’abord, nous avons sollicité l’avis des représentants du personnel, puis avons ajouté une annexe « gestion de la pandémie » dans le document unique de chacune des deux sociétés du groupe. Ensuite, nous avons rédigé une procédure d’intervention chez les professionnels et une autre chez les particuliers. Nous bouclons actuellement un plan d’organisation. A cet effet, nous avons rédigé trois fascicules que nous allons soumettre à la signature de chacun des salariés. Le but est de regrouper les informations par thèmes afin que chaque salarié trouve plus facilement l’information dont il a besoin. Le premier fascicule donne des informations générales. Le second présente les mesures de prévention globales. Et le troisième détaille les mesures spécifiques à chaque activité : laboratoire, atelier, dépôt et chantiers. Enfin, chaque matin, chaque salarié devra répondre à un questionnaire de santé. En parallèle, bien sûr, il faut analyser chacun des chantiers pour déterminer comment intervenir. Je tiens à préciser que cette reprise dépendra de la descente du pic d’épidémie en Occitanie et de l’accord de nos clients. Se pose aussi la problématique des équipements.
Qu’entendez-vous par là ?
Le groupe Géol France a passé commande de 1 200 masques via la chambre de commerce et d’industrie d’Occitanie. Nous devions les recevoir mi-mai. Ils n’arriveront que mi-juin. J’ai lancé une recherche pour trouver une solution palliative. Je me suis adressée à des couturières pour en trouver dix d’un côté, dix de l’autre. Nous privilégions les masques alternatifs. Il est hors de question d’acquérir des masques FFP2 ou chirurgicaux. Je ne veux pas priver les soignants. Nous avons les mêmes difficultés à trouver des combinaisons jetables. Nous devrions en recevoir 40. Cela nous permettra de tenir trois semaines.
Retrouvez l'article publié dans la version numérique du Moniteur en cliquant sur le lien suivant :
コメント